Condamnation d’Airbus pour discrimination : le jugement est publié

La Halde vient de rendre public l’arrêt de la Cour d’appel de Toulouse sur l’affaire opposant Airbus France à l’un de ses anciens intérimaires, Monsieur L.. Les attendus du jugement s’avèrent sévères à l’égard de l’avionneur.

Dans une première partie du jugement, la Cour d’appel a considéré les faits présentés par le plaignant et par la Halde pour les accepter comme des éléments tendant à laisser supposer l’existence dune discrimination.

Pour le poste convoité, Monsieur L. semblait en effet avoir  plusieurs atouts de son côté. Il disposait par exemple dune ancienneté supérieure à un autre postulant, Monsieur F. et les comptes-rendus « d’entretien compagnon », établis pour chacun des deux candidats, présentaient également des différences notables, à l’avantage de Monsieur L.. En dépit de ces éléments, la candidature de Monsieur L. a cependant reçu un avis réservé, tandis que celle de Monsieur F. recevait un avis favorable. Et c’est finalement Monsieur F. qui a été embauché.

Interrogée par la Halde, Airbus avait fait valoir que le poste ouvert à candidature requérait un savoir faire lié à l’utilisation dune machine dite de  nouvelle génération : Monsieur F. aurait disposé de cette expérience, à la différence de Monsieur L. Un constat d’huissier a cependant établi que les ateliers n’étaient guère équipés dun tel modèle de machine…

La Cour d’appel a en outre accepté d’intégrer dans ces éléments de contexte un comptage des embauches réalisé par la Halde. Selon l’enquête menée par la Haute autorité, entre le 1er janvier 2005 et le 30 juillet 2006, soit la période pendant laquelle la décision a été prise, sur 288 personnes embauchées par Airbus France, toutes avaient la nationalité française et seulement 2 personnes avaient un patronyme d’origine maghrébine. De surcroît, parmi les 43 agents embauchés en CDI sur le site, tous avaient un nom à consonance française. Au regard des demandeurs d’emploi inscrits à lANPE et qualifiés pour cette catégorie de poste, il y aurait donc eu une sous-représentation des salariés à patronyme d’origine maghrébine.

Pour la Cour d’appel, l’ensemble de ces faits laissaient donc bien supposer l’existence dune discrimination. Conformément au Code de travail, c’était donc à l’employeur d’apporter la preuve du caractère objectif de la décision d’embauche.

En la matière, les justifications avancées par Airbus n’ont pas convaincu le juge, qui a au contraire estimé que « la procédure de recrutement est caractérisée par une absence de transparence ». « La procédure de recrutement na permis de connaître ni le descriptif du poste ni les qualifications professionnelles requises » ajoute l’arrêt, qui relève : « en l’absence de définition préalable de ces éléments, l’employeur dispose de la faculté de concevoir a posteriori toutes les justifications appropriées si une pratique discriminatoire est détectée. »

Dès lors, Airbus ne peut reprocher à Monsieur L. de ne pas être titulaire dun bac professionnel. Cette condition de diplôme, avancée par l’employeur parmi ses justifications, s’est avérée sans rapport avec les exigences du poste : la Cour constate que sur 22 candidats embauchés en 2005 sur des postes analogues, 11 étaient titulaires dun BEP seul. Les autres éléments apportés par Airbus (notamment une « recommandation » de Monsieur F. par un site nantais qui s’avère n’être qu’une simple attestation de travail) n’ont pas plus convaincu le juge.