Pour la Halde, interdire l’accès des campings aux gens du voyage est discriminatoire

Dans une délibération adoptée le 25 janvier 2010 (transmise à l’association des Maires de France, et téléchargeable sur le site de la Gazette des communes), la Halde recommande à Maire de revoir les règles d’accès à un camping municipal interdit aux gens du voyage. Une association s’était en effet plaint dun arrêté qui, dans son article 1er, prévoyait : « Le terrain de camping municipal du “Moulin B” est réservé exclusivement aux touristes. Ne sont considérés comme touristes que les personnes qui en période habituelle habitent en domicile fixe. Toute personne ne disposant pas de domicile fixe ou exerçant une profession itinérante quelle qu’elle soit, artisan, commerçant ou autre de même que les travailleurs devant intervenir temporairement sur le territoire de la Commune, ne peuvent en aucun cas s’installer sur le terrain de camping. »

En réponse aux demandes d’explications de la Halde, le maire de la commune en question avait publié un nouvel arrêté qui indiquait dans son nouvel article 1er : « Le terrain de camping municipal Moulin B est réservé exclusivement aux touristes. La période d’ouverture du terrain est fixée au 1er avril au 30 septembre. En dehors de cette période, l’accès est absolument interdit sauf autorisation exceptionnelle. » Le maire a en outre expliqué qu’une aire d’accueil allait prochainement ouvrir, et que le camping était situé en zone inondable, donc ne pouvant être ouvert toute l’année ni accueillir les caravanes double-essieux.

La Halde a néanmoins jugé ces explications insatisfaisantes : « L’exclusion des caravanes double essieux au regard de la nature des sols ne pourrait être justifiée que par des impératifs de sécurité qui ne sont pas présentés en l’espèce. Au demeurant, un critère de charge maximale à l’essieu serait plus pertinent ; à défaut cette exclusion peut caractériser une discrimination indirecte, les gens du voyage utilisant largement ce type de véhicules. » Par ailleurs, ajoute la Halde, « le Maire dans ses réponses fait explicitement le lien avec les textes municipaux concernant le stationnement des gens du voyage et la réalisation d’une aire d’accueil » et l’ancienne formulation de l’article 1er de l’arrêté visait explicitement les gens du voyage, en reprenant leur définition légale. Ce sont donc bien les gens du voyage qui sont visés par la municipalité.

La Halde ajoute que « la loi “Besson” relative à l’accueil et l’habitat des gens du voyage instaure un dispositif d’action positive destiné à la fois à leur permettre de stationner, et à favoriser leur intégration dans la cité, et non à légitimer leur exclusion de tout espace autre que les seules aires d’accueil. » Enfin,  la Halde avance que « le classement “tourisme” ne permet pas de réserver l’accès au camping à une certaine catégorie de personnes, mais peut uniquement justifier l’édiction de règles relatives à la durée du séjour sur le camping. »

Pour la Halde, l’arrêté, dans sa seconde version, caractérise donc « une discrimination indirecte car, bien que fondé sur un critère en apparence neutre, il aboutit à exclure de manière systématique les gens du voyage, alors même que seules des restrictions tenant au respect des règles communes, telles que la limitation de la durée du séjour et l’interdiction d’exercer une activité rémunérée sur un terrain de camping, sont légitimes au regard de la réglementation en vigueur. »

Interrogé par la Gazzette des communes, Pierre Hérisson, sénateur UMP de Haute Savoie et président de la commission nationale consultative des gens du voyage, se « réjouit d’une telle délibération qui affirme qu’aucune catégorie de la population ne doit subir de discriminations.» « Élus, ajoute-t-il, nous devons faire très attention à ne pas inclure de disposition qui exclue telle ou telle catégorie de la population. »

Pour lAssociation nationale des gens du voyage catholique, « cette délibération marque bien le fait que la loi Besson est pervertie par les communes qui regardent les aires d’accueil comme la seule solution d’habitat des gens du voyage et mettent en oeuvre tous les dispositifs contraignants possibles afin que ceux-ci ne puissent s’installer nulle part ailleurs sur leur territoire.»